Depuis sa reprise par le chinois Geely, Volvo fait preuve de beaucoup de dynamisme. Voilà de quoi piquer ma curiosité. Rencontre avec Marc Debord, Directeur Communication Corporate de la marque en France qui nous en dit plus sur les ambitions du constructeur suédois.
Automotive Marketing (AM) : Bonjour Marc. Tout d’abord, afin de mieux vous connaître, pouvez-vous svp nous présenter votre parcours en quelques mots ?
Marc Debord (MD) : J’ai rejoint Volvo Car France à la rentrée 2006. Auparavant, j’ai occupé des fonctions similaires pendant trois années chez Mitsubishi Motors France et durant huit ans chez Nissan France où j’ai passé également six ans sur des fonctions marketing. Je suis un véritable passionné d’automobile et j’ai commencé ma carrière chez Mercedes France.
AM : Volvo a été racheté par le constructeur Geely en 2010. Pour autant, existe-t-il encore des synergies avec le groupe Ford, l’ancien propriétaire de la marque ?
MD : Oui bien entendu, l’automobile reste une industrie lourde, il y a encore des cycles de vie de certains produits qui ont l’empreinte de l’alliance avec Ford. La Volvo V40 par exemple et sa déclinaison V40 Cross Country reposent sur une plate-forme partagée. Certaines motorisations également comme le moteur diesel D2 de 115 ch d’origine Ford/PSA.
AM : À partir de quand pourra-t-on alors considérer Volvo comme totalement indépendant ?
MD : La réelle indépendance de la marque va se matérialiser avec le nouveau XC90 qui sera dévoilé, en octobre, au Mondial de l’automobile de Paris. Il reposera sur une toute nouvelle plate-forme modulable SPA et bénéficiera de moteurs inédits comme une nouvelle version hybride rechargeable/essence qui sera disponible dès le lancement ! A partir de là découleront les remplacements de la S80, du V70/XC70 et de la famille 60 un peu plus tard. Il n’y a que la gamme V40 qui nécessitera une autre plate-forme mais tout ceci est en phase d’étude, la génération actuelle étant très récente. Esthétiquement, nous développons une nouvelle signature stylistique que l’on a pu apercevoir sur nos trois derniers concepts révélés à Francfort, Détroit et en ce moment même à Genève. Au travers de ces 3 concepts, on a une vraie orientation stylistique de la marque pour les années à venir. Et comme les premiers échos sont bons, c’est plutôt de bon augure…
Esquisse officielle futur Volvo XC90
AM : Quel est le positionnement de Volvo ?
MD : Nous avons clairement un positionnement premium et, de ce fait, nos principaux concurrents sont germaniques. Mais nous avons nos propres atouts distinctifs à commencer par une vraie identité, une personnalité unique. Il y a un héritage naturel avec nos origines suédoises qui véhiculent des valeurs fortes et qui n’ont pas changé depuis la création de la marque : la sécurité et l’aspect environnemental. Ce sont des valeurs fortes qu’on ressent immédiatement quand on découvre une Volvo. Nous ne sommes pas du tout une marque show off, nous sommes une marque premium non ostentatoire. Et on a rajouté depuis quelques temps la signature du design scandinave apparu avec le lancement de la C30 qui sortait des formes cubiques habituelles des anciennes Volvo. Cette orientation s’est distinguée et même renforcée avec le lancement du XC60 et les modèles qui ont suivi. Chez Volvo, nous véhiculons un certain art de vivre.
AM : En terme de communication, comment cela se matérialise-t-il ?
MD : Nous menons beaucoup d’actions dans les domaines culturel et sportif. Ainsi, quand on pense Volvo, on pense en premier lieu à la voile, ce qui nous a d’ailleurs valu de racheter une course mythique Whitbread, devenue la Volvo Ocean Race en 2002. (NDLR : Plus d’infos ici). Logique pour la Suède, un pays entouré d’eau. Dans ce cadre, nous avons mené beaucoup d’opérations avec la Fédération Française de Voile ces trois dernières années. Nous avons été par ailleurs partenaire du navigateur Franck Cammas qui a remporté la dernière édition de la course (en 2011-2012) et qui roule ainsi en Volvo V60 Plug-in hybrid.
Nous sommes également très présent dans le golf avec la compétition Volvo Golf Champions et Volvo World Golf Challenge. Nous avons aussi un partenariat avec le musée Maillol, à Paris, où nous organisons régulièrement des opérations de relations publiques. Au-delà de la communication, nous nous devons d’entretenir un pouvoir de séduction avec le bon produit qui correspond aux attends de nos acheteurs. Et avec notre gamme, nous avons clairement une belle carte à jour. Nous souhaitons être une marque désirable d’autant plus qu’en France, nous n’avons pas forcément les mêmes moyens que nos concurrents pour être toujours présents dans les médias classiques. Nous cherchons alors à nous distinguer…
AM : Comme avec Zlatan ?
MD : Oui, c’est le cas. Pour tout vous dire, cette opération est une initiative de la filiale suédoise. Mais le phénomène s’est étendu à toute l’Europe du fait de la popularité de cette personnalité charismatique et particulièrement en France puisque Zlatan joue au PSG. Un partenariat qui fonctionne donc et qui devrait probablement perdurer.
AM : Zlatan Ibrahimovic jouant au football en France, la filiale française va-t-elle en bénéficier ?
MD : Oui, nous aimerions. Déjà, nous déclinerons bientôt la campagne XC70 réalisé avec le footballeur avec le modèle XC60, notre marché étant plus au crossover qu’au break, contrairement à la Suède. [NDLR : Petite exclu pour vous, voici la campagne qui sera diffusée dans quelques jours].
AM : Peut-on espérer une présence du footballeur sur le stand Volvo au Mondial de Paris ?
MD : J’en ai fait la demande ! D’autant plus qu’il serait à coup sûr séduit par le nouveau XC90. Zlatan roule en XC60 en France, c’est quelqu’un qui aime particulièrement l’automobile et il est très attaché à ses valeurs suédoises.
AM : Vous évoquiez tout à l’heure la nécessité pour Volvo de se démarquer. Comment y arrivez-vous ?
MD : Nous menons peut-être des réflexions plus approfondies de manière à cibler nos actions en adéquation avec une cible potentielle de clientèle. Cela passe par exemple par du placement produit au cinéma comme dans le film « Supercondriaque » de Dany Boon qui vient de sortir sur les écrans. Nous avons été approché par la production et, après avoir vérifié la bonne utilisation du véhicule, nous avons accepté d’y prendre part. Une partie du tournage a eu lieu en Belgique, pays où se trouve notre usine de production. Cela a facilité la logistique et a permis de prêter un véhicule. Notre Volvo XC60 est présent dans cinq ou six scènes jouées par le personnage de Kad Mérad.
AM : Comment allons-nous entendre parler de Volvo en 2014 ?
MD : L’événement important du moment, c’est bien entendu le Salon de l’auto de Genève avec la présentation de notre 3ème et dernier concept-car Estate qui montre les orientations futures de Volvo.
Parallèlement à cela, nous aurons des séries limitées au travers de la Volvo Ocean Race. Il y a aura des déclinaisons V40 Cross Country, XC60 et V60 personnalisées aux couleurs de la course. Ces modèles seront produits dans le monde à 15 000 exemplaires à répartir dans tous les pays. En 2015 il y aura une étape de la Volvo Ocean Race à Lorient ce qui fait que nous sommes beaucoup plus concernés.
Enfin, nous avons une forte actualité centrée sur nos nouvelles motorisations innovantes Drive E qui, après être apparues sur les familles 60/70/80, s’étendent aujourd’hui à la V40 et V40 Cross Country. (NDLR : Plus d’infos sur Drive E ici). Des motorisations 4 cylindres essence et diesel (et non plus 5 cylindres comme auparavant) 100% Volvo aux performances accrues tout en offrant des consommations et des émissions de CO2 réduites.
AM : Puisque nous parlons de V40, c’est le modèle que nous avons essayé (lire l’essai ici). Etes-vous satisfaits de ses performances commerciales ?
MD : V40 évolue sur un segment hyper compétitif et nos trois principaux concurrents ont renouvelé récemment leurs modèles. C’est le cœur du marché en Europe et un segment très important et difficile en France. On a introduit la V40 Cross Country en cours d’année dernière pour agrandir la famille et la combinaison des deux a fait que ça a été le modèle de la gamme le plus vendu en France (NDLR : 4348 immatriculations) devant le XC60. C’est donc pour nous un produit stratégique. De par ce marché très compétitif, nous l’avons repositionné en début d’année avec la version Effektiv Line à partir de 19 990€. On retrouve vraiment l’identité de la marque au travers de son style et dispose de véritables atouts face à ses concurrentes, tel que le premier airbag piéton, une exclusivité mondiale de Volvo. En effet, parmi les études faites par le centre de sécurité Volvo, c’est un phénomène classique que le piéton heurte le pare brise ; avec cet airbag, on réduit drastiquement les conséquences qui peuvent être parfois dramatiques.
AM : La presse fait état de nombreuses rumeurs quant à l’élargissement de la gamme. Qu’en est-il ?
MD : On nous attend sur beaucoup de segments, notamment dans des segments inférieurs… Mais on ne peut pas tout faire, ou du mais pas tout d’un coup. Notre actionnaire Geely a prévu un plan d’investissements de 11 milliards d’euros d’ici à 2015.
Donc oui, la gamme sera amenée à grandir. Mais il faut pour cela que nos investissements et nos efforts soient couronnés de succès. C’est pour le moment le cas au niveau international et nous encourage à continuer de développer la gamme.
AM : Vous aviez testé des C30 électriques il y a quelques années. La marque envisage-t-elle de lancer un véhicule 100% électrique prochainement ?
MD : La marque s’axe principalement sur des véhicules plug-in hybrides. C’est un choix conforté par le succès du V60 Plug in Hybrid avec 10 000 ventes l’année dernière dont 300 en France. Avec la C30 électrique, nous avons voulu démontrer que nous pouvions et savions le faire. Mais il y a encore trop de contraintes qu’on ne maîtrise pas : le manque d’infrastructure ou encore la question de l’autonomie et le côté anxiogène que cela provoque, la peur de la panne que fait-on si on n’a plus de batterie ? L’alternative la plus séduisante pour nous est donc le plug-in hybrid qui offre trois voitures en une : on peut rouler en 100% électrique, 100% thermique ou hybride. Le conducteur est libre de son choix en fonction de sa situation de circulation : c’est pour nous le meilleur compromis actuellement.
AM : Volvo, bientôt à 1% de part de marché ?
MD : Le marché français est un marché particulièrement compliqué : il y a une très forte présence des constructeurs nationaux, sans compter la complexité du marché en lui-même et de sa règlementation. Je connais peu de marque qui ont percé de manière importante du jour au lendemain, cela prend du temps. La marque Volvo a été introduite en 1956 a frôlé les 20 000 ventes annuelles dans les années 1980 parce que nous avions à ce moment dans la gamme un véhicule « d’accès ». Sinon, on a toujours oscillé aux entre 13 000 et 15 000 ventes annuelles. On table cette année sur des volumes équivalents mais, bien entendu qu’avec les nouveautés et les efforts déployés par le réseau (52 partenaires qui ont 122 points de vente), nous visons 1% de pénétration à terme.
AM : Vous bénéficiez sur le web d’une excellente image. Comment Volvo s’intéresse à ces nouvelles formes de communication ?
MD : On y est très sensible, en France comme en Suède. C’est très lié à l’automobile en elle-même car de nombreux développements sont prévus sur les futures Volvo afin de renforcer l’interface homme/machine. Que ce soit dans la relation du conducteur avec son auto mais aussi vers l’extérieur. Mais aussi entre le conducteur, son concessionnaire et même Volvo Car France. Le conducteur de demain pourra avoir beaucoup d’outils et d’applications embarquées pour mieux communiquer. D’où notre implication forte sur les réseaux sociaux. Bien entendu, tout est fait en adéquation avec le service marketing puisque nous avons dans l’équipe deux personnes dédiées au digital : l’une en charge du CRM et l’autre qui travaille principalement sur les réseaux sociaux. Nous travaillons également en collaboration avec une agence spécialisée. Sur la page Facebook de Volvo France, nous avons plus de 60 000 fans : il faut bien entendu alimenter la page en contenus mais aussi répondre aux attentes. Au niveau des Relations Publiques, les journalistes et blogueurs sont des gens « connectés ». Il nous faut nous adapter à cela en développant les outils adéquats [NDLR : Volvo présentait d’ailleurs au Salon de Genève son partenariat avec Apple pour lancer CarPlay]
AM : Dernière petite question pour mieux connaître le « conducteur » Marc Debord. En quelle Volvo roulez-vous au quotidien ?
MD : En XC70. Une voiture que j’apprécie particulièrement car elle correspond à mes besoins. D’une part, je roule beaucoup (50 000 km par an) et je vis à la campagne. J’affectionne particulièrement ce modèle à la fois très confortable et sûr. Un produit qui me correspond.
Un grand merci à Marc Debord pour sa disponibilité avant, pendant et après cet entretien.
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